Vous en avez marre d’acheter des aliments industriels qui plombent votre trésorerie ? Vous n’êtes pas à l’aise pour échanger avec vos fournisseurs d’aliments… Apprenez (ou ré-apprenez) à faire les rations de vos différentes catégories d’animaux. Grâce à notre tableur Excel fourni, et quel que soit votre race caprine (Saanen ou Alpine), vous pourrez vous exercer à établir vos rations. Dans un premier temps, avec vos aliments et matières premières actuels, puis en intégrant progressivement d’autres fourrages pour gagner en autonomie mais sans perdre en productivité !
- Durée totale = 7h30
- Inscription jusqu'au 5 Mai 2023
- Fin de la formation le 20 Juin 2023
La formation comprend :
- 31 vidéos - 2h48
- 4 quiz et 88 questions pour vérifier vos acquis
- Un tableur excel pour faire ses rations soi-même
- Livret pédagogique (158 pages - format A4)
- 1 visio (2h30) en direct avec le formateur en fin de formation
- Suivi technique et administratif durant toute la formation
- Prise en charge par VIVEA jusqu'à 100% (selon éligibilité)
Le programme
- Avant de commencer
- A vous de travailler !5min
- Votre contrat de formation10min
- Vos attentes15min
- Points de vigilance15min
- Rappel sur la digestion des ruminants
- Introduction3min
- Comprendre le rumen5min
- Les termes techniques-Intro1min
- Les termes techniques-energie5min
- Les termes techniques-proteines7min
- Les termes techniques-fibre6min
- Synthèse module 12min
- Quiz de fin de module16 questions
- Connaître les fourrages pour mieux les valoriser
- Prairies temporaires de graminées8min
- Cas des mélanges multi-espèces9min
- L'herbe, ça se récolte tôt !12min
- Bien valoriser le pâturage9min
- Choisir ses prairies temporaires8min
- Les légumineuses : trèfle et luzerne7min
- Les méteils7min
- Colza fourrager, chicorée, plantain5min
- Le sorgho10min
- La betterave2min
- Pourquoi réduire l'ensilage de maïs ?9min
- Conclusion1min
- Quizz fin de module 250 questions
- Savoir utiliser les ingrédients de la ration
- Les ingrédients – introduction5min
- Les fourrages4min
- Les concentrés5min
- Les co-produits3min
- Quiz de fin de module17 questions
- Calculer ses rations
- La méthode de calcul6min
- Exemple ration chèvres laitières13min
- Exemple ration chèvres gestation5min
- Exemple ration chevrette10min
- Exemple erreur de ration2min
- Quelques repères de diarrhées2min
- Best off des erreurs de ration2min
- Conclusion1min
- Quiz de fin de module5 questions
- Accès au tableur excel
- Accès au tableur10min
- FIN DE FORMATION - Classe virtuelle du 20/06/2023 de midi à 14h45
- replay2H 45min
- Questionnaire de satisfaction15min
Les objectifs
- Connaître les fourrages pour mieux les valoriser
- Rappel sur la digestion des ruminants
- Savoir utiliser les ingrédients de la ration
- Apprendre à calculer les rations
- Savoir calculer les rations avec un tableur excel pour les différentes catégories d’animaux
Pré-requis
- Aucun pré-requis n'est nécessaire
Public cible
- Éleveurs de chèvres laitières
- Porteurs de projet d’installation en agriculture
- Élèves de l’enseignement agricole
- Conseillers élevage
Extrait gratuit
Introduction ration
Formateur de la formation
Yan MATHIOUX
Consultant indépendant en nutrition des ruminants depuis plus de 15 ans, Yan MATHIOUX, accompagne et forme des éleveurs qui souhaitent retrouver de l’autonomie dans la gestion de l’alimentation de leurs animaux, réduire leurs charges, et pour cela, changer leur façon de travailler.
Résumé de la formation
Le développement d’une agriculture intensive aux objectifs élevés a entraîné une évolution des pratiques agricoles. Ainsi, pour nourrir le cheptel bovin, la production d’ensilage de maïs s’est imposée par son rendement important, son niveau énergétique et sa bonne conservation. Mais cet aliment carencé en protéines oblige l’agriculteur à acheter des tourteaux de soja d’importation (à raison de 1 kg pour 10 kg d’ensilage maïs utilisés) afin de compléter la ration de ses bêtes, et ainsi combler leurs besoins physiologiques. Pourtant des solutions alternatives existent. Elles apparaissent en parallèle au développement de nos connaissances sur la culture des fourrages et leurs apports nutritifs. Dès lors, à l’issue de cette formation, l’agriculteur pourra faire les choix lui permettant de s’affranchir de sa dépendance aux coproduits protéinés, réduisant ainsi significativement ses charges tout en préservant la santé de son troupeau, et donc sa productivité.
Déterminer la ration idéale d’un ruminant : une question d’équilibre entre bon fonctionnement du rumen et apports nutritionnels
Non sans un peu d’humour, Yan Mathioux nous donne cette définition : « Le ruminant, c’est une grosse panse avec une vache autour » ! Cette fameuse panse est aussi appelée rumen. Dans « cette grosse poche d’eau chaude » (d’un volume de 250 à 300 l chez les bovins, 15 l pour les ovins) de minuscules êtres vivants cohabitent. Bactéries et levures forment le gros de cette microflore à l’ouvrage dans la cuve de fermentation anaérobie (sans air) que représente le rumen. Pour une utilisation optimale, la panse réclame un pH neutre (7) et la présence de fibres. Or, c’est bien la ration alimentaire de votre animal qui détermine le contenu du rumen. Un déséquilibre dans la ration peut ainsi engendrer une acidose qui provoque la chute de l’immunité du bovin avec pour symptôme fréquent une fourbure (pouvant aller jusqu’au décollement de l’onglon).
Des micro-organismes au travail conditionné par un apport en fibres suffisant et un pH neutre
Dans la panse, certaines bactéries dégradent les nutriments et les chaînes de protéines quand d’autres transforment l’amidon en sucres :
Les bactéries cellulolytiques s’attaquent à la cellulose Les bactéries amylolytiques dégradent l’amidon. Quant aux levures, elles se chargent de la lignine. Si le pH du rumen baisse (acidification), ce précieux équilibre microbien est menacé de destruction. À noter que les bactéries amylolytiques supportent bien une certaine acidité.
Mais attention, un aliment lourd et sec (comme les concentrés), tombé au fond du rumen, sera peu accessible aux micro-organismes. Cet ingrédient coûteux (céréales et tourteaux) est alors gâché. La panse doit être stimulée mécaniquement par les fibres pour que l’animal rumine suffisamment. Cela permettra aussi de remettre en contact l’aliment avec les bactéries et autres levures qui le dégraderont. Dans le cas contraire, un gâchis digestif, voire une subacidose guette votre animal.
L’importance de la « valeur ruminante » dans une ration
La structure physique d’une ration (sa valeur « ruminante ») conditionne en grande partie la digestion des aliments et la santé de la vache. En effet, l’apport de fibres stimule les parois du rumen et entraîne des contractions conduisant à la rumination. Les aliments sont ainsi mâchés, avalés et régurgités à de nombreuses reprises. Il existe un outil pour apprécier cette valeur ruminante : le Penn State Separator, mis au point à l’université de Pennsylvanie. La ration est passée à travers une succession de tamis permettant d’en distinguer les éléments, fins ou longs. Plus les aliments sont fins, moins la rumination sera importante et inversement. Or, la salive produite pendant la rumination contient du bicarbonate de sodium, composé chimique alcalin (neutralisant l’acidité). Le lien déterminant entre rumination et pH du rumen est ainsi établi. Sans cette salive, l’acidité de la digestion gagnerait la panse jusqu’à en brûler les papilles. Si la ration manque de fibres, un ajout de paille sera effectué (en veillant toutefois à ne pas trop encombrer le rumen) : elle augmentera de 170 minutes le temps de rumination par kilo distribué. En comparaison, ce temps supplémentaire de rumination sera de 95 min/kg pour un bon foin et d’à peine 16 min/kg pour du concentré. Mais ce dernier remporte la faveur de la vache qui trie souvent sa ration avec son mufle pour le manger précipitamment (un peu d’eau ou de mélasse pour agglomérer le tout viendra l’en empêcher). C’est que notre animal a ses préférences ! Pourtant, par ses prédispositions naturelles, il n’est pas inutile de rappeler que la meilleure nourriture pour la vache est tout simplement l’herbe.
Qualités de l’herbe comme fourrage face à l’ensilage de maïs
En effet, l’herbe a un pH neutre avec un bon équilibre entre protéines et énergie. Elle contient ce qu’il faut de cellulose pour bien faire fonctionner le rumen. Par contre, aucune trace d’amidon ne s’y trouve car sa digestion n’entre pas, pour ainsi dire, dans le programme naturel de la vache. Nous mettons le doigt sur un autre défaut, avec la carence en protéines, de l’ensilage de maïs : le sucre rapide présent dans la plante ayant été utilisé pour sa conservation (par fermentation anaérobie), l’ensilage de maïs n’offre plus que de l’amidon en guise d’énergie. Nous allons voir pourquoi cela peut nuire à la santé du bovin.
La transformation des aliments en énergie : des sucres à surveiller
Quatre sources d’énergie sont à la portée de la vache :
Les fibres végétales constituant l’herbe, le foin ou la paille. C’est la microflore particulière de sa panse qui permet au ruminant de transformer la cellulose en énergie. Les sucres solubles contenus naturellement dans les plantes. L’amidon que l’on trouve donc dans le grain de maïs et aussi dans les céréales à paille. La matière grasse comme l’huile végétale parfois donnée à un animal que l’on veut engraisser, ou pour augmenter le taux butyreux du lait. Après la fermentation microbienne dans le rumen (qui produit des gaz : dioxyde de carbone et méthane), les glucides de ces matières premières sont transformés en Acides Gras Volatils (AGV) qui passent dans le sang et fournissent l’énergie nécessaire à l’animal. On mesure la valeur énergétique d’un fourrage en unité fourragère (UF) avec pour référence la valeur énergétique (en calorie) d’un kilo d’orge récolté au stade grain mûr.
Deux grands types de glucides nous concernent :
Les glucides cytoplasmiques présents dans le sucre soluble, la mélasse, la pulpe de betterave et l’herbe jeune mais aussi dans l’amidon, les céréales ou encore les pommes de terre. Les glucides pariétaux que l’on trouve dans la cellulose, l’hémicellulose, la pectine des agrumes et la lignine des tiges, en résumé dans les fibres végétales. Les glucides cytoplasmiques sont dits fermentescibles. Composés de molécules de sucre aisément dégradées par les bactéries du rumen, ils sont rapidement digérés. En trop grande quantité, ils entraînent une augmentation brutale des AGV faisant chuter le pH du rumen et menaçant celui-ci d’acidose. Voilà pourquoi l’amidon comme source d’énergie principale du ruminant est un facteur de risque pour la santé du troupeau.
Fibres, protéines, amidon lent ou rapide : un accord à trouver
Pour contrecarrer ce risque, on utilise des aliments à valeur NDF importante. En effet, la NDF (Neutral Detergent Fiber) mesure les fibres contenues dans l’aliment : plus cette valeur est haute, plus il est fibreux et donc long à assimiler. Ajouter des fibres (pas trop longues) dans la ration écarte la menace d’une digestion trop rapide. Revers de la médaille, la valeur nutritive de ces aliments est faible entraînant un risque d’amaigrissement des vaches. La question du dosage entre l’amidon (et les sucres en général) et la valeur NDF (essentiellement la cellulose) des aliments est donc primordiale.
L’amidon est toutefois un sujet complexe car il faut distinguer amidon rapide et amidon lent. À quantité égale, 66% d’un grain de blé, composé d’amidon rapide comme l’orge ou le triticale, est dégradé en seulement deux heures par le rumen alors que seulement 34% d’un grain de maïs le sera dans le même temps (pour une même teneur d’environ 60% d’amidon). C’est que le maïs, comme le sorgho ou la pomme de terre, contient de l’amidon lent. L’ensilage de maïs suit ce même rythme, ce qui limite donc le risque de son utilisation.
De surcroît, cet apport d’énergie doit être croisé avec l’apport de protéines, tout aussi important. Le taux de matière azotée totale (MAT) est un bon indicateur du niveau protéique d’un fourrage. Si la matière azotée est soluble son absorption sera rapide. Quoi qu’il en soit, le bon fonctionnement du rumen (en appliquant les règles que nous avons vues) conditionnera la valorisation des protéines contenues dans une ration.
En conclusion, pour maintenir des vaches laitières en bonne santé et productives, l’amidon doit représenter maximum 28% de la ration. Si ce taux dépasse les 28%, l’acidité prend le pas dans le rumen supprimant les bactéries cellulolytiques qui dégradent les fibres. On retrouve alors ces dernières telles quelles dans la bouse molle et jaunâtre caractéristique de cette situation. En effet, pour peu que l’on sache l’interpréter, l’aspect des bouses du troupeau est un indicateur pertinent de leur bonne digestion.
La bouse, ça vaut le coup de mettre le nez dedans !
« Hips don’t lie » chantait Shakira, mais la bouse aussi ne ment pas ! Notre formateur l’affirme, elle est le reflet exact de la qualité d’une ration. Elle permet d’observer la bonne absorption des aliments fournis. L’étude des bouses (la « bousologie ») est incontournable pour tout éleveur attentif. La bouse idéale doit être en forme de petit volcan, très fine et assez foncée (comme une mousse au chocolat précise Yan Mathioux). Toute anomalie constatée doit interroger l’agriculteur sur un défaut autour de la ration ingérée :
La ration est qualitativement déséquilibrée L’animal a trié dans une ration mal mélangée, ou avec des aliments à fibres trop longues facilement repérables L’exploitant ne pèse pas la ration distribuée provoquant une erreur dans les quantités L’animal n’a pas digéré la totalité de sa ration par manque de rumination Rappelons toutefois que sur 10 kg de ration alimentaire, une vache en valorise 7 kg (pour 3 kg rejetés dans ses excréments, principalement des fibres grossières), ce qui constitue un résultat satisfaisant.
Connaître les fourrages pour mieux les utiliser, et quelques conseils pour réussir l’implantation d’une prairie temporaire
Le terme générique d’herbe regroupe une multitude d’espèces. Nous allons commencer cet aperçu des graminées fourragères par les ray-grass, l’ingrédient de base des prairies temporaires.
Le ray-grass italien (RGI) : c’est le fourrage le plus utilisé en France, il est facile à réussir et démarre vite. On l’utilise en fauche, ensilé ou enrubanné. Toutefois, sans eau, sa croissance est stoppée lorsque les températures dépassent les 25°. Le ray-grass anglais (RGA) : son implantation est rapide, il est riche en sucres digestibles et pousse bien sous climat tempéré. On le sème pour les pâturages, en association avec le trèfle blanc, car il résiste au piétinement. Par leurs précocités variables, les différentes variétés en mélange permettent une souplesse d’utilisation. Lui aussi ne pousse plus quand il fait plus de 25°. Le ray-grass hybride (RGH) : c’est un bon compromis, plus productif mais humide à la récolte. Le dactyle : riche en protéines et souvent associé à la luzerne, il est très productif. Doté d’une bonne résistance à la sécheresse, sa production estivale est appréciée mais il craint les hivers humides. Pérenne mais son implantation est assez lente. La fétuque élevée : le 4×4 des graminées selon Yan Mathioux. En effet, elle supporte le piétinement, s’adapte aux sols difficiles comme aux climats extrêmes ; ses feuilles sont très appétentes et donnent un super foin assez facile à faire sécher. Petit bémol, sa valeur alimentaire est un peu inférieure à celle d’un ray-grass. Le brome : très rapide d’implantation, appétent et riche en sucre, il réclame un sol sain et léger et ne veut pas passez l’hiver les pieds dans l’eau. La fléole des prés : souvent plantée en association, elle s’accommode d’un sol acide et résiste bien au froid mais n’apprécie pas la concurrence. Le pâturin des prés : après une implantation lente et délicate, il résistera à des conditions difficiles. Pérenne et ne redoutant absolument pas la pâture, il prolonge la durée de vie d’une prairie. La fétuque des prés : plante à bonne valeur alimentaire, productive et appétente. Adaptée au terrain humide, craignant la sécheresse, elle est d’un grand intérêt en association.
Avantages et critères d’utilisation des mélanges de semences
Ces mélanges multi-espèces (souvent de conception suisse), parfois complexes et au prix de revient assez élevé, offrent :
une amélioration de la productivité (1 à 2 t de plus à l’hectare par an) une bonne adaptation aux conditions pédoclimatiques une bonne valeur alimentaire qui se distingue surtout par son équilibre requérant peu de correction (par l’ajout de concentré). Dans le détail, cette augmentation de la productivité s’explique d’abord tout simplement par une végétation plus abondante. Mais aussi par une interaction positive des plantes entre elles, la légumineuse fixant l’azote qui profitera aux graminées, réduisant d’autant la fertilisation nécessaire au printemps. En outre, la ration de base est équilibrée en énergie et en protéines dès le départ, ce qui permet de s’épargner un travail supplémentaire (pour amener du concentré par exemple). Comme nous l’avons dit, le mélange suisse est moins sensible aux difficultés climatiques rencontrées car les variétés présentes arrivent à maturité à des dates différentes. De même, on note une économie de désherbage. En effet, semer beaucoup de graines différentes, dont certaines démarrent vite, limite les adventices et donc ce que l’on appelle le « salissement » des prairies.
Comment choisir entre les mélanges dans une gamme aussi fournie ? Les questions à se poser sont les suivantes :
Combien de temps vais-je garder cette prairie ? Six mois seulement, entre deux cultures de céréales par exemple, ou cinq ans (voire plus) ? C’est choisir entre une culture dérobée à croissance rapide qui s’intercale entre deux cultures principales annuelles ou un mélange « trois ans et plus » (avec un principe de substitution des espèces). Pour quelle utilisation (en tenant compte de la distance prairie-bâtiments de l’exploitation, ou aussi du temps de séchage) : fauche et ensilage, pâture, mixte ? Quelles sont les conditions pédoclimatiques (le mélange suisse s’adaptant à la parcelle) ? Type de sol (humide ou sain) Froid Sècheresse Chaleur Quel est le pH du sol (acide ou non) ? Quelle est l’exposition (plein nord, plein sud) ? À quelle altitude (question importante en Suisse) ? À qui le mélange est-il destiné ? Des bêtes en tarissement ou en engraissement n’ont pas les mêmes besoins en protéines. D’autres critères peuvent être pris en compte :
La souplesse d’exploitation qui correspond à l’intervalle de temps entre le stade épis à 10 cm et le début épiaison. Influe sur le moment d’entrée sur les parcelles en lien avec la qualité des sols. L’alternativité : pour le RGI très utilisé, l’alternatif épie l’année du semis (avec une pérennité de 6 à 12 mois) alors que le non-alternatif doit passer l’hiver pour épier (pérennité de 12 à 24 mois). La diploïdie : entraîne le doublement des chromosomes de la plante, la rendant plus productive mais aussi plus humide.
Qualités et rôles des légumineuses dans une association de cultures
À tout seigneur tout honneur, commençons par la luzerne. En effet, Yan Mathioux n’hésite pas à le dire « la luzerne, c’est la voie la plus puissante à l’hectare pour produire des protéines dans une ferme et du coup avoir une autonomie alimentaire en terme de tourteaux ». De surcroît, c’est un « aliment santé » contenant des fibres de qualité très digestes. Sa richesse en calcium lui confère un « effet tampon » sur l’acidité éventuelle du rumen. Son rendement à l’hectare est exceptionnel (jusqu’à 16 à 18t de ms/ha) et pour ce qui est de sa valeur protéique, elle peut facilement dépasser les 18 de MAT (pour atteindre les 21). Toutefois, elle ne pousse pas dans les sols acides, craint l’humidité comme le piétinement, et le choix de sa variété doit être guidé par son indice de dormance. Si elle n’est pas très riche en énergie (ce qui sera compensé par une association avec une graminée, le dactyle ou le brome par exemple), son apport en protéines offre une économie de tourteaux appréciable. À vrai dire, seul le trèfle peut la concurrencer au niveau MAT. Un peu moins productif et d’une pérennité moindre, ce dernier s’adapte mieux aux sols humides et acides. Parmi ses nombreuses espèces citons :
Le trèfle violet : il s’impose dans un mélange et bouche les trous au démarrage d’une prairie. Surtout destiné à la fauche, il n’a pas besoin de fertilisation azotée puisqu’il fixe l’azote de l’air (comme les trois variétés suivantes). Pérennité 2 à 3 ans. Le trèfle blanc : lui aussi bouche les trous et limite donc les adventices. C’est le plus équilibré dans le rapport énergie/protéines. D’une pérennité souvent supérieure à quatre ans. Le piétinement ne le gênant pas, il est régulièrement associé au RGA en prairie pâturage. Le trèfle d’Alexandrie : annuel et gélif, sa rapidité d’implantation et sa forte productivité en font une culture dérobée parfaite après une céréale. Le trèfle incarnat : annuel, mais résistant au gel il peut être semé en fin d’été pour une coupe (unique) au printemps. Toujours associé à un RGI, peu productif et difficile à faire sécher (pour le foin), il sert parfois d’engrais vert (apport d’azote). Ainsi, dans une ration pour bovins, le trèfle (comme la luzerne) permet une diminution importante du recours au tourteau de soja ou de colza (de l’ordre de 300 à 500 g pour 1 kg MS).
Ce type de légumineuse est associé à des graminées, nous l’avons vu, mais peut aussi entrer dans la composition d’un méteil (mélange de céréales et protéagineux) pour faire du fourrage, du grain ou du stock. Dans cette alliance, les céréales apportent leurs qualités habituelles en valeur énergétique et en fibres. D’autre part, il existe des méteils à haute valeur protéique lourdement chargés en protéagineux, composés de pois fourrager, vesces ou féveroles (la céréale servant de tuteur). Récolte précoce (à partir de mi-avril) et préfanage (pour ne pas juter dans le silo) sont les conditions de réussite de ce fourrage. Comme Yan Mathioux nous le dit, ce méteil vaut un « très très bon ray-grass-trèfle » avec en prime la possibilité de faire du stock tout en laissant un sol plus apte à faire du maïs.
Et pour terminer ce tour d’horizon des renforts protéiques, comment ignorer le colza fourrager. « De la protéine vite et pas chère », voilà un bon slogan pour sa publicité ! En culture dérobée, il peut être associé aussi bien à un RGI qu’à de l’avoine. Avec jusqu’à 20 % de MAT, et en le rationnant soigneusement à cause du risque de météorisation, il permet lui aussi d’économiser du concentré.
Pour réussir une culture, pas de place à l’improvisation !
Cela passe d’abord par le respect d’un protocole d’implantation :
Un labourage : ce travail du sol a pour but de favoriser un enracinement dense et profond ; L’application d’un engrais de fond avec un chaulage possible afin de remonter le pH et d’ajuster le niveau en PK (phosphore et potassium) ; Un roulage qui laissera un sol bien propre et plat pour un semis régulier et à faible profondeur ; Un semis à vitesse adaptée utilisant un mélange homogène ; Un nouveau roulage pour favoriser la levée ; Une aide à l’installation des plantes avec (si cela est nécessaire) un désherbage et une fumure ajustée. Noter l’importance du contact graine-terre pour une prairie temporaire (comme pour une pelouse) avec un semis peu profond (1 à 1,5 cm).
Quand semer ?
Au printemps : pour les espèces qui craignent le froid, en se méfiant de l’envahissement d’une prairie au démarrage difficile par des adventices. Il ne faut donc pas semer trop tard, ce qui limitera aussi le risque hydrique estival. En fin d’été : le sol est encore chaud, le risque hydrique presque inexistant et les adventices en fin de cycle. Une coupe sera possible dès le printemps suivant mais attention au gel précoce, au démarrage de la luzerne par exemple (là aussi ne pas semer trop tard).
« Management » de la récolte et valorisation des prairies par le pâturage tournant dynamique
Yan Mathioux nous avertit : « On peut disserter des heures sur le mélange à semer, le nerf de la guerre c’est la conduite de l’herbe ». Pour obtenir de son fourrage des valeurs nutritionnelles performantes et ainsi réduire ses achats (de coproduits protéinés…), notre formateur le garantit : « il faut récolter tôt ». Naguère, on recommandait d’agir juste avant le début d’épiaison pour rentrer une récolte offrant un bon compromis entre valeur nutritionnelle et volume de production. Aujourd’hui, on privilégie le début de montaison (l’épi est encore dans la gaine) qui offre moins de quantité immédiate mais un meilleur taux de protéines. Pour renseigner l’exploitant sur la date du déclenchement des opérations, il existe un indicateur d’une précision mathématique et pour cause : la somme des températures. On trouve cette information dans les journaux agricoles départementaux ou, évidemment, sur internet (grâce aux relevés moyens journaliers réalisés par Météo-France).
Lorsque le cumul des températures (à partir du 1er janvier) atteint 200°, on peut effectuer la première fertilisation en azote. À 400° cumulés, il est grand temps de sortir les bêtes, manière de tondre une première fois la prairie. Puis à partir de 700°, c’est l’agriculteur qui pourra réaliser une coupe. Elle servira à l’ensilage ou aux foins. À l’aide des statistiques de Météo-France, il faut rechercher « la plage de beau temps » (donc sans pluie) du mois d’avril pour faucher. Ne pas en profiter, c’est prendre le risque d’un retard conséquent dans son calendrier entrainant une récolte appauvrie au niveau nutritionnel. Bien sûr, cette date varie selon les régions.
Une récolte, ça se prépare : agenda et choix techniques
Un agriculteur utilisant les services d’une CUMA doit anticiper la date de son chantier de récolte pour ne pas plus tard murmurer en lui-même : « c’est toujours les mêmes qui passent en premier ! ». Il faut veiller à disposer du matériel requis en temps voulu car une récolte tardive signifiera fourrage médiocre ! Si tout s’emboîte correctement, protéines et énergie seront au rendez-vous d’une production réalisée sur votre ferme.
Une fois la bonne date calée, comment récolter ? Cette question cache encore un enjeu économique. Bien sûr, le pâturage est le moyen le plus direct et le moins coûteux pour faire manger de l’herbe aux ruminants (à condition que vos champs soient proches et bien clôturés, voir ci-dessous). La pratique de l’ensilage permet quant à elle de ramasser le plus de feuilles possible (sans trop brasser le fourrage), ce qui fait grimper le taux de protéines. Seul le séchage du foin en grange en vrac peut faire aussi bien, mais il requiert un investissement important. L’ensilage (avec un taux de matière sèche supérieur à 30%) est en outre une technique rapide (en comparaison avec l’enrubannage où l’on doit rentrer les balles) et peu coûteuse de faire du fourrage conservé. Travailler le foin sur place est moins cher mais plus gourmand en temps (avec l’étape du fanage). De plus, cette dernière méthode laisse beaucoup de feuilles par terre. Dans le cas de la luzerne, la feuille contient plus de 25% de MAT contre seulement 11% pour la tige, ce qui laisse deviner la perte en valeur alimentaire subie.
Yan Mathioux conclut sa démonstration sur l’importance d’une récolte précoce (fin avril-début mai) avec un exemple concernant une exploitation de 50 vaches laitières. Un ensilage d’herbe raté (« ce qui est assez facile à faire », ironise notre formateur) entraîne des dépenses supérieures à 30 000 € à l’année pour rectifier la qualité nutritionnelle défaillante du fourrage. Cette somme pour le moins considérable se répartit en achat de concentré (pour l’apport en protéines), de céréales et de maïs, et même d’huile de palme (pour l’énergie). Tout cela en vain puisque, comme le dit Yan Mathioux, de mauvais ingrédients donneront une mauvaise cuisine. Ainsi, malgré l’apport de compléments alimentaires onéreux, la production laitière du troupeau concerné ne sera pas à la hauteur des espérances de l’agriculteur.
Rendement des prairies et bonne alimentation des animaux : on ne fait pas mieux que le pâturage !
C’est la méthode la plus économe : on sous-traite le travail à nos vaches. Les points à respecter pour un pâturage efficace sont les suivants :
Sortir les vaches dès les 300° cumulés (à 200° pour les moutons qui sont moins lourds) Utiliser une surface limitée pour assurer une bonne rotation des prairies, soit 30 ares par vache au printemps et de 50 à 85 ares en été où la végétation se fait plus rare. Faire entrer les animaux dans un champ lorsque l’herbe y atteint 20 cm et les faire sortir de celui-ci en préservant une hauteur de 5 cm nécessaire à la reprise de l’herbe. Intégrer l’ensemble de ces mesures dans une rotation de huit jours. Ménager un temps de repos de 18 à 21 jours par parcelle au printemps (intervalle qui peut monter à une quarantaine de jours en été). Noter qu’une herbe de 25-30 cm de haut (ce qui peut vite survenir au printemps) est à la fois moins riche et moins appétente pour les animaux. Il vaut mieux alors la faucher pour en faire du foin. Ou pratiquer le topping : on fauche la parcelle dédaignée par les bêtes, l’herbe laissée sur place connaitra en général un plus grand succès auprès du troupeau. Privilégier les prairies multi-espèces, avec une herbe de moins de 20 cm, pour les animaux en engraissement (avec une vente de l’animal avant la saison sèche). Une alliance colza+ray-grass est aussi utilisée pour un pré-engraissement dans l’élevage de charolaises. Tout cela forme un système que l’on peut affiner par la mise en place d’un pâturage tournant dynamique. Petites parcelles et rotations rapides sont les fondations de cette pratique. Ce mode de pâturage requiert toutefois une exploitation bien adaptée avec :
Un accès à l’eau dans toutes les parcelles Des chemins d’accès assez larges et confortables Un travail important sur les clôtures à l’échelle du nombre plus élevé de parcelles. Un départ des rotations à un moment bien précis à ne pas manquer : le stade des trois feuilles (garantissant valeur alimentaire et reprise de végétation).
Le stade des trois feuilles, point de départ d’un pâturage tournant dynamique bien réalisé
En effet, le pâturage tournant doit suivre un tempo bien précis :
Un repère d’entrée : attendre le stade des trois feuilles sur lequel nous allons revenir. Un temps de présence : jamais plus de trois jours sur la même parcelle. Un temps de repos : à moduler avec la vitesse de repousse de l’herbe, selon la saison. Un repère de sortie : ne jamais pâturer la gaine des graminées. Ce stade trois feuilles, atteint en vingt à cent jours en fonction de la pluviométrie et de la chaleur, signale un fourrage aux capacités nutritives optimales. En outre, les feuilles présentes ont permis à la plante de réaliser la photosynthèse, processus transformant l’énergie solaire en sucres. Ces glucides accumulés dans les racines permettront à la plante de reprendre sa croissance dans les meilleures conditions, avec une bonne pousse à la clé.
Quand les animaux arrivent tardivement sur la parcelle, les plantes ont avancé leur développement vers la formation d’un épi et d’une tige plus solide. La lignine présente en quantité dans la tige en question s’avère un élément peu digeste pour notre ruminant.
Pour résumer les avantages du pâturage tournant :
Une herbe plus productive et plus digeste. Un fourrage au couvert plus dense s’imposant mieux face aux adventices. Mais avec suffisamment de lumière pour un bon développement du trèfle. Donc moins d’intrants (engrais), moins de mécanisation (ce sont les animaux qui travaillent !) et moins de frais en carburant (pour la même raison). Enfin, des animaux plus dociles car souvent déplacés pour leur plus grand bien (alimentaire).
Des manières différentes de le récolter suffiront-elles pour sauver le soldat maïs ?
C’est dans le grain que réside tout l’intérêt nutritionnel du maïs. Le récolter en plante entière, comme pour un ensilage classique, signifie récolter une tige et des feuilles qui ne valent pas mieux qu’un foin de prairie moyen. C’est pour cela que se développent deux façons de récolter le maïs (un peu plus tardives) privilégiant son grain et offrant ainsi un produit concentré en énergie :
Le maïs grain humide : les grains sont battus avant d’être secs puis broyés et conservés en conditions anaérobies dans un silo type boudin. L’ensilage de maïs épi : plus économique à la récolte et surtout plus sécurisant au niveau du rumen que le précédent grâce à la présence de cellulose et d’amidon lent. Le maïs a la réputation d’avoir besoin de beaucoup d’eau. En réalité, il lui en faut essentiellement au moment de la fécondation des épis de fin juin à mi-août. Un stress hydrique pendant cette période et la plante donnera des épis lacunaires en grains. Or, il n’échappe à personne que les sécheresses sont de plus en plus récurrentes à nos latitudes à cette époque, entraînant de sévères restrictions en eau. La culture du maïs devient alors de plus en plus périlleuse, poussant l’agriculteur à la recherche de plantes plus adaptées à ces conditions climatiques.
La sécheresse aura-t-elle la peau du maïs ? Un candidat à la succession : le sorgho
Il ressemble au maïs, il est énergétique, mais il est sans amidon (ou presque) : c’est le sorgho ! Un simple « Canada Dry » du maïs me direz-vous ? Plus que cela, la plante originaire d’Afrique possède un système racinaire puissant qui lui permet de résister à un été sec, faisant de lui un remplaçant crédible au maïs. La variété BMR (brown mid rib : nervure centrale marron) est plus digestible (avec moins de lignine) et riche en sucres solubles (mais verse facilement). À semer un peu plus tard que le maïs car il doit démarrer vite, le sorgho pourra « exploser » aux premières pluies suivant une sécheresse estivale. Doté (en valeurs moyennes) de 0.95 d’UFL (avec moins de 10% d’amidon) et 8 % de MAT, il se conserve très bien. Enfin, en prenant en compte toutes les étapes de la production, le sorgho coûte 600 à 700 € à l’hectare contre 1000 € pour le maïs. Alors, le sorgho solution d’avenir ?
Des plantes remarquables qui ont déjà séduit les agriculteurs (et les ruminants) du bout du monde
La betterave fourragère n’a rien d’exotique, elle fut longtemps cultivée dans nos campagnes au prix d’un travail considéré comme une corvée. Mise de côté ces dernières décennies, elle revient aujourd’hui dans nos champs en suivant l’exemple des Néo-Zélandais, encore eux, qui n’hésitent pas à la faire pâturer. Les vaches ne réfléchissent pas longtemps avant de déraciner cette plante sucrée ! Ses qualités sont nombreuses. Par exemple, elle récupère remarquablement après une sécheresse en utilisant les réserves d’énergie stockées dans ses racines. Cette « bombe énergétique », pour citer Yan Mathioux, se conserve bien en silo avec une aération adéquate et une protection de paille contre le gel. Très appétente, elle égaiera, sans excès à cause d’un effet laxatif, la ration hivernale des bovins. Son exploitation, entièrement mécanisée, est devenue moins fastidieuse. On lui prête même des vertus sur la santé des bêtes : elle améliore la digestibilité globale de la ration, donne le poil lisse et soyeux, et facilite l’expression des chaleurs !…
Ce facteur santé se retrouve dans deux plantes à tanins : la chicorée et le plantain. En effet, les tanins permettent une meilleure valorisation par l’animal des protéines solubles des légumineuses. Ils réduisent la météorisation et possèdent des propriétés antiparasitaires et nématicides reconnues. Pauvres en fibres mais riches en minéraux, le plantain et la chicorée ont un taux de MAT excellent, compris entre 25 et 27%. Leurs variétés fourragères ont été développées en Nouvelle-Zélande où elles sont utilisées principalement pour l’engraissement à l’herbe des agneaux, mais aussi des bovins. Semés en association, la chicorée et le plantain se consomment en pâturage tournant, sous peine de se faire déborder par sa vitesse de pousse ! Cerise sur le gâteau, la chicorée et le plantain résistent à la sécheresse, une qualité aujourd’hui de plus en plus recherchée.